Avant de débuter la lecture…
Les recherches en neurosciences progressent grâce à l’imagerie cérébrale. Elles permettent comprendre comment se fait l’apprentissage tout en déboulonnant de nombreux neuro-mythes.
Quelques découvertes sur le cerveau
Votre élève s’installe à côté de vous pour une explication. Il prend la peine de vous dire qu’il est visuel et que vous devez lui expliquer les concepts en écrivant ou en traçant les figures. Pour répondre à son style d’apprentissage, que faites-vous de différent? Comment doit-on différencier les pratiques pédagogiques en fonction des styles d’apprentissages des élèves? Est-ce que vous connaissez votre style à vous? Influence-t-il vos actes pédagogiques?
Vous avez des élèves moins doués en mathématique, sont-ils plus cerveau droit, donc plus artiste que logique? Comment en tenez-vous compte dans vos approches d’enseignement? Avez-vous des situations d’apprentissage destinées davantage aux cerveaux gauches et d’autres aux cerveaux droits?
Si vous ne tenez pas compte des styles d’apprentissages de vos élèves ni de leur dominance cérébrale, vous avez raison, tout ça n’est absolument pas démontré par la recherche. En fait, il semblerait que modifier les pratiques pédagogiques en fonction des styles d’apprentissages n’influence en rien l’apprentissage.
Les récentes recherches sur le cerveau et l’apprentissage s’appuient sur l’imagerie cérébrale où il est possible de voir le cerveau en train d’apprendre. De plus, il est possible d’observer les modifications du cerveau suite à un apprentissage en comparant différentes approches pédagogiques. Ces recherches ont permis de faire quatre découvertes qui pourraient changer complètement la façon d’enseigner, d’apprendre et d’étudier.
Première découverte : connaissances erronées sur le cerveau
Nos intuitions spontanées sont fréquemment des neuro-mythes. Un grand pourcentage des enseignants croient aux styles d’apprentissages et à la dominance cérébrale. De plus, les enseignants les plus connaissants sur le cerveau sont ceux qui ont le plus de connaissances erronées surtout en ce qui a trait aux neuro-mythes.
Deuxième découverte : La neuroplasticité
L’apprentissage modifie le cerveau, influence le développement des connexions entre les neurones. En bref, le cerveau change au fur et à mesure qu’on apprend et ces changements s’observent à l’aide de l’imagerie cérébrale. Les changements sont visibles dans la structure du cerveau.
Troisième découverte : Influence du cerveau sur l’apprentissage
Le cerveau possède des contraintes qui influencent les apprentissages. Les neurones situés près l’un de l’autre et qui s’activent ensemble se connectent ensemble. Ceci renforce la consolidation des apprentissages en créant des réseaux de neurones interreliés. Toutefois, lorsqu’on cesse d’activer les réseaux, ces derniers finissent par disparaitre.
On dit que l’élève doit être actif dans ses apprentissages. En réalité, c’est le cerveau de l’élève qui doit être actif. Mais qu’est-ce qui fait qu’un cerveau est actif? En réalité, un cerveau qui est actif est un cerveau qui travaille à récupérer l’information qui est en mémoire et la réutiliser. Ce point est particulièrement important, car ce n’est pas lorsqu’on explique des notions à l’élève qu’il va les apprendre, mais c’est en lui posant des questions sur ce qu’on vient de lui expliquer.
Une activité neuronale répétée améliore l’apprentissage ainsi que l’espacement des séances d’apprentissage. Il y a un meilleur apprentissage lorsqu’on fait plusieurs courtes séances d’études répétées régulièrement plutôt que de faire une seule longue séance d’étude. Un retour régulier sur les apprentissages précédents permet de les consolider. Cette découverte devrait être partagée avec les élèves afin de leur montrer comment optimiser leurs périodes d’études et leur façon d’étudier.
La structure initiale du cerveau influence également les apprentissages. La création de nouveaux réseaux de neurones s’appuie sur les réseaux déjà en place. La solidité des apprentissages faits au niveau primaire influencera donc la facilité d’apprendre lorsque l’élève atteindra le secondaire.
Quatrième découverte : Influence de l’enseignement
L’enseignement, en particulier l’approche pédagogique, peut influencer le fonctionnement du cerveau. Pour l’instant, peu d’études portent sur ce sujet et les observations sont encore préliminaires. On observe les différences dans le cerveau en comparant différentes approches, mais pour l’instant, les implications que cela engendre sont encore à être approfondies.
Pour en savoir plus :
Conférence de Steve Masson:
Steve Masson est professeur à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et directeur du Laboratoire de recherche en neuroéducation (LRN). À l’aide de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, il étudie les mécanismes cérébraux liés aux apprentissages scolaires et à l’enseignement. Il s’intéresse particulièrement aux effets de l’apprentissage et de l’enseignement des sciences sur le cerveau et au rôle de l’inhibition et du recyclage neuronal dans les apprentissages difficiles. En plus d’être directeur en chef de la revue Neuroéducation, il est président de l’Association pour la recherche en neuroéducation, un organisme ayant pour mission le développement et la diffusion de la recherche en neuroéducation. En 2013, il a reçu le prix Pat Clifford pour la recherche en éducation en début de carrière pour ses travaux combinant les neurosciences et l’éducation.
La conférence a été présentée lors du Colloque International, « L’aventure des neurosciences, à Angers (France) le 3 juin 2015